jeudi 31 octobre 2013

Voyage sur la célèbre route 66: un appel de l'histoire

C'était la «rue principale des États-Unis», la «route mère», la voie de l'Ouest: la route 66 reliait autrefois Chicago, en Illinois, à Los Angeles, en Californie. Deux voies, trois fuseaux horaires, huit États, 3945 kilomètres. Créée en 1926, elle a symbolisé le progrès, l'aventure, la misère, la liberté, le rêve américain. Contournée ou transformée en autoroute à partir des années 60, elle a été officiellement rayée de la carte en 1985. Mais la légende, elle, a continué son chemin.
À l'extérieur du Angel & Vilma's Gift Shop, des motels, cafés et magasins de souvenirs se succèdent sur la rue principale: la feue route 66. De vieilles Ford et Chevrolet plus ou moins déglinguées sont exposées devant les commerces. Quelques bâtiments abandonnés se mêlent aux vieux néons et aux maisons. Juste à côté du magasin d'Angel Delgadillo, le casse-croûte de son défunt frère, le Snow Cap, sert des hamburgers, des hot-dogs et d'énormes «milkshakes» dans des verres en carton sur une terrasse qui accueille, en cette fin d'avant-midi, un groupe de touristes japonais.


UN DÉCLIN DOULOUREUX

Si ce patelin respire encore, c'est grâce à Angel Delgadillo. Quand l'autoroute a contourné Seligman en 1978, le village a connu la misère. Comme des dizaines d'autres communautés établies le long de la route 66, son économie reposait entièrement sur le passage des voyageurs.
Pour s'en sortir, celui que l'on surnomme «l'ange gardien» de la route 66 a créé avec ses alliés la première Historic Route 66 Association, en 1987. Son but? Faire campagne auprès du gouvernement pour que ce dernier fasse de la voie abandonnée une route historique et touristique.
Il a réussi. La même année, le premier tronçon de la «Historic US Route 66» a été reconnu et il existe maintenant des associations pour la promouvoir dans tous les États qu'elle traversait. Des villages sont revenus à la vie, des panneaux routiers ont été installés et, aujourd'hui, des touristes du monde entier viennent «faire la route 66», du moins ce qui n'a pas été effacé sous le bitume des autoroutes.


L'Arizona a quelques bons arguments pour servir d'État «initiatique» à ceux qui souhaitent faire une partie de ce voyage dans le temps. En plus d'être celui qui l'a vue renaître, l'Arizona est celui qui l'a vu mourir, puisque c'est dans la ville de Williams que sa dernière portion a été court-circuitée par l'autoroute en 1984. L'État possède encore 320 km de l'étroite voie originale, dont le plus long tronçon ininterrompu du pays, entre Ash Fork et Topock.
Sur cette portion de 260 km, on retrouve un concentré de ce que la route offre aux voyageurs. Des élans de nostalgie dans les «diners» où l'on sert les mêmes plats depuis 40 ans; une sérieuse dose de kitsch dans les commerces qui débordent de souvenirs ou d'objets rouillés; un brin d'aventure dans les motels à 50$ la nuit; la vision d'un triste déclin dans certains villages en ruine; et une image mythique de l'Ouest américain avec le chemin de fer, les montagnes arides et les «buissons qui roulent».
Mais pour comprendre vraiment l'intérêt de ce long ruban d'asphalte, il faut prendre la peine de s'arrêter au Historic Route 66 Museum de Kingman, une ville de 28 000 habitants dont le quartier historique a conservé plusieurs cafés, néons ou stations-service d'autrefois.
Le musée est simple, mais il situe tout: la création de la 66 à partir, notamment, d'anciennes pistes de chariot. La publicité qu'on lui a faite dès sa création en la nommant «route principale des États-Unis». Les années de 30 et la Dépression, racontées par John Steinbeck dans Les Raisins de la Colère, roman (et film) célèbre qui a donné à la US 66 son surnom de «route mère» et qui décrit la fuite vers la Californie de milliers de familles sans terre et sans travail.
On découvre aussi l'époque suivant la Deuxième Guerre mondiale, où la route de l'Ouest est devenue, au contraire, symbole de prospérité. C'est l'époque où les Américains visitaient le pays dans leur «station wagon» ou leur grosse Chevrolet.
Au fil des époques, elle a acquis une signification différente pour chaque génération. Depuis la sortie du film d'animation Les Bagnoles («Cars») en 2006, même les enfants ont une raison de s'y référer, puisque l'action se déroule dans un village inventé de la route 66.

UN VENT DE LIBERTÉ

Pour plusieurs, le rêve c'est... la route elle-même. C'est le «road trip», c'est la liberté, un peu comme l'évoque Jack Kerouac dans son fameux On the Road, un autre roman associé à la mythique 66 (et porté à l'écran en 2012).
Pour les passionnés de conduite, l'un des secteurs les plus excitants de l'Arizona est situé à l'ouest de Kingman, dans les Black Mountains, vers la frontière californienne.
Étroit, frôlant les parois rocheuses, presque périlleux avec ses tournants en U, ce tronçon monte jusqu'à 1080 m d'altitude, avant de redescendre vers Oatman, une (très) étrange ville minière du début du 20e siècle ressuscitée pour les touristes.
Ceux qui roulent plutôt vers l'est à partir de Kingman finissent par rejoindre une autre chaîne de montagnes, celle des San Franciso Peaks. Une fois passés quelques villages fantômes, ils grimpent à Williams, une petite ville demeurée prospère grâce à sa proximité avec le Grand Caynon (100 km), qui prend bien soin de son morceau de la route mère.


Vient ensuite Flagstaff, perchée dans les pineraies au pied du mont Elden. Dans cette jolie ville collégiale de 66 000 habitants, il faut lever la tête pour repérer les néons du Motel du Beau et les autres vestiges de la grand-route. Et on pourrait continuer encore, en alternant vieille 66 et autoroute jusqu'à Winslow, jusqu'à Joseph City, puis jusqu'à la frontière du Nouveau-Mexique.



ROUTE 66 EN ARIZONA: REPÈRES

S'Y RENDRE

-On vole jusqu'à Phoenix, capitale de l'Arizona, et on loue une voiture à l'aéroport.
-De Las Vegas (Nevada), le voyage jusqu'à Williams est d'environ 425 km en combinant Route 66 et autoroutes.

GPS

-Comme la route 66 n'existe plus, le GPS n'est pas très utile. Il vaut mieux préférer la bonne vieille carte routière et guetter les panneaux «Historic US 66».

À FAIRE ABSOLUMENT

-Visiter le Grand Canyon, attraction magistrale de l'Arizona (à 95 km de Williams, 125 km de Flagstaff).

QUELQUES ADRESSES EN RAFALE

Motels vintage
- El Trovatore, Kingman: 40$/nuit, eltrovatoremotel.com
- Le Canyon Lodge, Seligman: 60$/nuit avec petit-déjeuner,route66canyonlodge.com
- Les deux auberges de jeunesse de Flagstaff: grandcanyonhostel.com
Casse-croûte chaleureux
- Westside Lilos's Cafe, Seligman
- Mr D'z, Kingman: mrdzrt66diner.com
- Pine Country, Williams: pinecountryrestaurant.com
Magasins de souvenirs
- Le General Store de Hackberry: hackberrygeneralstore.com
- Addicted to Route 66, Williams: addictedtoroute66.com
- Angel & Vilma's Gift Shop, Seligman: route66giftshop.com
En savoir plus
- Historic Route 66 Association of Arizona: azrt66.com
- Arizona Office of Tourism: arizonaguide.com

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